MUSIQUE. La scène électro caennaise, très en vogue ces dernières années, est particulièrement hétéroclite. Louis Roche, alias Madame, incarne cette jeune génération de producteurs et DJs. À 23 ans, il a déjà compilé six EPs. De passage à Rock n’ solex le 7 mai dernier, celui qui a récemment signé chez Boys Noize Records nous explique son amour pour la techno et retrace son parcours.
WZ : Salut Louis, comment as-tu commencé à toucher aux platines ?
Madame : J’ai d’abord commencé à produire de la musique il y a 6 ans, dans ma chambre, comme beaucoup de ma génération. C’est en me rendant au Nördik Impakt, près de chez moi, à Caen, que j’ai découvert la musique électronique en festival. Depuis quatre ans, ce goût que j’ai rencontré pour la techno et l’attrait pour la scène m’ont poussé à mixer ma propre musique.
Justement, quelle est la différence entre un producteur et un DJ ?
Produire de la musique, ce n’est pas forcément jouer la sienne. C’est intégrer dans son set des morceaux d’artistes qui nous plaisent, ou que l’on remixe. Quand je fais des « dj sets » de deux heures, ça m’arrive de ne jouer qu’un ou deux de mes morceaux. Parfois, sur scène, je sens que ce n’est peut-être pas le bon moment d’envoyer mes propres « tracks ». L’exercice de DJ c’est en fait une recherche musicale permanente, qui n’est pas forcément évidente. Cette recherche s’effectue quand on commence par être producteur, car on construit son propre style et le message que l’on veut faire passer. Pour moi, il vaut mieux être producteur avant d’être DJ. Cela permet de ne pas proposer, par la suite, des morceaux qui n’ont rien à voir avec ses « dj sets ».
Tu as déjà réalisé six EPs. La réalisation d’un album, tu y penses ?
Justement, il faut que le style musical et la personnalité soient tous les deux bien définis. Pour l’instant c’est pas encore le cas chez moi. Je suis dans ce travail constant de recherche sonore. Il faut se sentir prêt. Le premier album d’un artiste est pris très au sérieux par beaucoup de personnes : le public comme la critique. C’est donc important qu’un projet de cette envergure mûrisse avant de voir le jour. J’ai déjà trouvé mon style, mais quand tu fais un album, tu délivres une plus grande image de toi. Et cette recherche là, je ne l’ai pas forcément encore faite.
Pourquoi avoir choisi « Madame » comme nom de scène ?
J’ai choisi de m’appeler « Madame » car la musique que je produis est à l’opposé de ma personnalité. On pourrait penser, derrière cette techno sombre que je déploie, que je suis une personne agressive et méchante. Ce n’est pas du tout le cas. Je suis une personne assez introvertie et timide dans la vie. « Madame », c’est également un nom français. C’était important pour moi de ne pas choisir un nom anglais, comme beaucoup de DJs le font.
Tu es à l’initiative du Club 808, un collectif de producteurs que tu as créé avec des amis en 2012. Récemment, tu as signé chez le label de Boys Noize. Comment mesures-tu, aujourd’hui, le chemin parcouru ?
Je ne regarde pas trop en arrière pour le moment. Aujourd’hui, je n’ai pas l’impression d’avoir accompli des choses incroyables. C’est très gratifiant de signer dans un tel label. Boys Noize est un producteur allemand très talentueux. Je ne préfère pas m’arrêter sur chaque décision que j’entreprends. Je vais là où le vent me mène, et je dois encore beaucoup progresser. Surtout, le fait que je sois encore étudiant et pas musicien à temps plein m’empêche, en quelques sortes, de visualiser mon parcours. J’arrive au bout de mes études et, bien-sûr, mes ambitions vont monter.
Savoir qu’on est « playlisté » par Diplo, Justice, Adam Beyer et Gesaffeltein, ça fait quoi ?
Évidemment, ça fait très plaisir ! (rires) Il y en a certains dans ceux cités qui m’ont inspiré. J’ai même été à certains de leurs concerts. C’est aussi avec eux que j’ai commencé à aimer la musique électronique. C’est donc une grande reconnaissance pour moi de savoir que ces artistes écoutent ma musique. Mes influences ne s’arrêtent pas là. Il y aussi Daniel Avery et Danny Daze qui m’ont poussé à faire de la techno.
Ta première scène tu l’as faite ici, à Rennes, en 2013, lors des Transmusicales. C’est symbolique, pour toi, de revenir dans cette ville aujourd’hui ?
Oui, ça a été une première vraie expérience scénique pour moi. Entre temps, je suis revenu au 88, et au festival Panoramas, à Morlaix. C’est toujours de très bonnes soirées. On le répète souvent mais le public breton est particulièrement sensationnel. C’est un plaisir, en tant qu’artiste, de venir jouer ici. Les Rennais savent particulièrement bien organiser ce genre d’évènements. Ils en sont aussi très friands. Mon premier concert aux Transmusicales, il y a maintenant quatre ans, a vraiment été très enrichissant.
Dans 10 ou 15 ans, est-ce que tu te vois encore mixer pour des festivals étudiants comme Rock n’ solex ?
Je ne savais même pas qu’il s’agissait d’un festival étudiant à la base. Et ce n’est pas ce qui me bloque. Ce soir, je joue quand même avec de grosses pointures de la scène techno. Je n’arrive pas à me projeter d’ici 10 ou 15 ans, mais je pense que oui, je reviendrai avec plaisir !
Sa musique est à retrouver ici.